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Nos aventures, nos rencontres, nos émotions

Qu’en est-il au niveau des organismes régionaux ? – La Chambre d’agriculture du Doubs

doubs

La qualité de l'eau dans le Doubs : un enjeu environnemental, économique et agronomique.

La rivière dénommée la Loue, dans le Jura, a été soumise à de fortes préoccupations quant à la mortalité piscicole subite en 2010. Depuis janvier 2014, d'autres épisodes de mortalités piscicoles affectent à nouveau la Loue, ainsi que le Dessoubre (autre rivière du département). Une des causes de cette mortalité est la dégradation de la qualité de la rivière (eutrophisation, colmatage des fonds, seuils et barrages, pollutions des sédiments,...). L'eutrophisation est liée à la présence d'azote et de phosphore dans les eaux. Ces deux éléments sont d'origine agricole et domestique, l'azote étant majoritairement d'origine agricole et le phosphore d'origine domestique. Bien que cette explication ne détermine pas à elle seule la mortalité piscicole, toute mesure allant dans le sens de la diminution des nitrates d’origine agricole dans les eaux régionales est bonne à prendre !

Alors que l'élevage laitier à base d'herbe soit la production dominante dans le Doubs (Comté, Morbier,...), la géologie calcaire et le milieu karstique (sols superficiels, dolines, failles, zones d'infiltration préférentielles,...) rend les cours d'eau et les nappes phréatiques particulièrement vulnérables aux activités de surface. Par ailleurs, le type de cours d'eau (rivières en 1ère catégorie piscicole en tête de bassin versant) exige une eau d'une qualité irréprochable (loin des critères moyens européens utilisés dans les zones vulnérables aux nitrates). Les spécialistes souhaiteraient pour les rivières du Doubs une eau ne dépassant pas 3 à 5 mg/l de nitrates alors qu'elle se situe à environ 8 – 10 mg/l (les normes européennes qui placent la barre à 50 mg/l pour une zone vulnérable est inadaptée au contexte local). Avec les mortalités piscicoles c'est toute l'image du département qui en pâtit : interdiction de la pêche, annulation de nuitées touristiques, impact négatif sur l'image verte du département, d'où une forte mobilisation des élus politiques, des administrations et une accentuation des contrôles réglementaires.

 

 

Une forte mobilisation du monde agricole pour reconquérir la qualité de l'eau

C’est dans cette optique, entre autres, que la Chambre d’agriculture du Doubs oriente et aide les agriculteurs à diminuer les effets néfastes que l’agriculture peut avoir sur l’environnement. Cette dernière est chargée de quatre grandes missions :

  • Représenter les intérêts agricoles auprès des pouvoirs publics
  • Préparer l’avenir économique et social de l’agriculture

  • Coordonner le développement et soutenir les porteurs de projets en relation avec le marché
  • Informer et conseiller les agriculteurs et les acteurs du milieu rural

Pour ce faire, différents axes d'actions sont planifiés. Nous trouvons parmi ceux-ci l'optimisation des pratiques et de l'économie des exploitations agricoles, l'appui au respect de la réglementation, la valorisation des déchets, l’utilisation d’énergies renouvelables et la gestion durable de l’environnement. C'est dans ce dernier axe que se trouve l'action de diminution des quantités de nitrates arrivant dans les cours d’eau.

 

Pour mener à bien cet objectif, plusieurs actions sont engagées auprès des éleveurs :

  • Incitation à la mise aux normes des bâtiments agricoles : l'augmentation des capacités de stockage des effluents liquides permet d'éviter les épandages en hiver,
  • Réalisation de cartes communales d'orientation des épandages à destination des agriculteurs et des élus afin d'identifier dans chaque commune les secteurs les plus sensibles.
  • Mise à jour des plans d'épandage des agriculteurs avec identification pour chaque parcelle de l'exploitation de son aptitude à l'épandage.
  • Formation pour les agriculteurs,
  • Bulletins techniques d’information sur la fertilisation, la valorisation des effluents et le rappel de la réglementation,...
  • Journées techniques épandages à destination des agriculteurs et des élèves des écoles agricoles de la région.
  • Essais et démonstrations en champs,...

 

Dans un soucis d’amélioration des techniques agricoles, dans le respect de l’environnement, la Chambre d’agriculture du Doubs réalise des essais sur le terrain. Actuellement, plusieurs tests sont réalisés pour éviter les pertes azotées.

Les pertes azotées se produisent notamment  lorsque le drainage vertical de l'eau sous la parcelle agricole entraîne les nitrates sous l'horizon exploitable par les racines. Cette lixiviation se produit au moment du rechargement des nappes, à hiver (selon la profondeur de sol et le régime climatique de l'année). En milieu karstique, il peut également se produire à d'autres périodes de l'année, après une forte pluie, du fait de sols superficiels. Les travaux menés par la Chambre d'Agriculture ont également montré que la technique du labour effectué en fin d'été après une prairie temporaire pour implanter une céréale d'automne pouvait générer un pic de minéralisation qui s'accompagne d'une production importante d'azote (jusqu'à 200 kg d'azote par ha) que la céréale d'automne (généralement une orge d'hier est incapable d'absorber). Cette céréale mise en place après labour consomme, quant azote durant la période hivernale. Ses besoins en azote au cours de l'automne sont estimés entre 20 à 40 kg d’azote par hectare. Dès lors, il y a une lixiviation importante d'azote sous forme de nitrates qui vont être lessivés vers les nappes phréatiques et les cours d’eau de la région.

 

Un exemple d'essais mis en place dans la région du Doubs 

Des essais de terrain sont proposés aux éleveurs. Ils sont destinés à acquérir des nouvelles références et à sensibiliser les agriculteurs. Ils sont mis en place au moment où l'agriculteur envisage de détruire une prairie temporaire pour implanter une céréale d'hiver. La parcelle est alors divisée en trois partie : 1) un témoin correspondant à la technique de labour traditionnel (fin aout/début septembre), 2) une partie implantée en semis directs, et 3) une partie conduite en labour anticipé (fin juin/début juillet) avec semis d'une culture dérobée fourragère destinée à absorber un maximum de l'azote produit par la destruction de la prairie temporaire et à fournir à l'éleveur un surplus de fourrage..

La méthode de semis direct évite l’aération du sol puisqu’aucun labour n’est effectué. Elle diminue ainsi la minéralisation azotée et le lessivage de l’azote dans les cours d’eau. Cependant, cette technique est associée à l'utilisation du glyphosate (désherbant non sélectif). De plus, peu d’agriculteurs sont équipés pour faire du semis direct, ce qui rend la mise en application de cette méthode difficile. Le suivi des parcelles semées en semis direct a aussi montré ses limites dans certaines situations (sol hydromorphe et automne/hiver très humide ayant entraîné la destruction par pourrissement de la céréale).

La méthode de labour anticipé consiste à faire un labour au début de l’été plutôt qu’en début d’automne. Un semis d'une culture fourragère est ensuite réalisé (ex. trèfle, ray grass, moha). Celui-ci profitera du pic de minéralisation et de la libération de l’azote du sol due au labour. Après exploitation de la culture fourragère au cours de l'été, on ne réalise pas un deuxième labour pour l'implantation de la céréale, le premier labour et les racines de la culture fourragère ayant joué leur rôle de restructuration du profil de sol. Un travail superficiel du sol permet finalement de préparer la terre pour la culture d’hiver (ex. orge) tout en évitant une aération trop importante du sol synonyme de production d'azote. Par contre, avec cette méthode, le problème d’adventices est également présent, poussant donc les agriculteurs à utiliser un désherbant dès l'automne (destruction du ray grass). Différents mélanges sont à l'étude pour obtenir le meilleur compromis (absence de labour, réduction de l'utilisation de produits phytosanitaires) par exemple avec le moha qui est gélif.

 

Le plan d'épandage : un outil agronomique au service de l'éleveur et de l'environnement

Afin de bénéficier de subside pour leurs bâtiments d’élevage, tout agriculteur doit se munir d’un plan d’épandage. Ils sont réalisés à l'échelle de l'exploitation à l'aide d'un logiciel de SIG (Système d'Information Géographique) où sont récoltées les données recueillies par un technicien qui visite toutes les parcelles avec une tarière (outils servant à récolter des profils de sol). Les plans d'épandage se basent sur quatre critères principaux ; la réglementation de la région (proximité des habitations, distance par rapport aux cours d’eau et puits de captage d’eau potable, …), la configuration de la parcelle (pente, présence de dolines, …), la profondeur du sol, et la présence ou non d’hydromorphie. Ces critères détermineront si l’épandage est interdit sur la parcelle (zones rouges ou mauves), est possible mais sous certaines conditions (zones oranges et jaunes) ou est autorisé (zones vertes).

Plan d'épandage Chambre Agriculture Doubs

 

A réfléchir/améliorer :

  • Les différentes normes environnementales contraignent de plus en plus les agriculteurs dans leur travail. S’adapter à ces normes coûte souvent cher et  les subventions ne suffisent pas toujours à rembourser ces frais. Par ailleurs, les agriculteurs doivent satisfaire une consommation qui se veut à faible prix. Est-il dès lors possible de concilier une agriculture respectueuse de l’environnement, saine et à faible prix ? Ou le consommateur doit-il également prendre conscience de ses choix et assumer une partie du prix pour le respect de l’environnement ?
  • Le respect du plan d’épandage dans la région du Doubs est facilitée par le fait qu’il existe rarement un excédent d’effluents d'élevage. De fait, les vaches du Doubs fournissent le lait destiné à la production du fromage Comté. Ce dernier possède un cahier de charge très strict quant à l’alimentation des vaches, mais également quant à l’environnement du bétail, favorisant fortement l’agriculture et l’élevage extensif. La plus-value sur le lait destiné au Comté est suffisante pour que de nombreux éleveurs se mettent à l’agriculture/élevage extensif. L’agriculture extensive est également favorisée dans cette région par la prime herbagère européenne (PHAE). Une Belle complémentarité entre agriculture et élevage pour un respect de l’environnement !

 

Pour aller plus loin :

 

 Article réalisé suite à la rencontré avec Didier Tourenne, conseiller agro-environnemental à la Chambre d’agriculture du Doubs

(Promotion AGRO LLN 1992).

http://www.chambres-agriculture.fr/

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