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Et l'économie dans tout ça?

economie_durableLe commerce de manière générale, et plus particulièrement le commerce international, est une opportunité pour les agriculteurs du Sud de revendre leurs produits à un prix qui leur permet d’augmenter considérablement leurs revenus. Cependant, la manière dont le commerce va s’organiser peut être plus ou moins favorable aux pays dits du Sud. Différents points sont à prendre en considération lorsque nous abordons ce sujet ; certains d’entre eux sont relevés ici. 

 

Un prix juste pour des produits de qualité

Le marché international, bien qu’étant une opportunité pour les agriculteurs du Sud, peut ne pas toujours leur être favorable. Sauf si nous sommes face à une situation de pillage ou d’esclavagisme, la qualité des produits agricoles sera à l’image du prix perçu par les agriculteurs. Si le prix perçu par l’agriculteur est trop faible pour couvrir ses coûts de production, il consacrera moins de temps à ces cultures afin de libérer du temps pour d’autres activités sources de revenu. Cela est particulièrement vrai pour les produits nécessitant une grande attention de la part des agriculteurs, comme le café, le cacao, le riz, les bananes ou encore l’élevage. Il est donc primordial de payer les agriculteurs à un prix juste si nous désirons avoir des produits de qualité.

 

Le rôle de l’information

Si le marché peut réellement augmenter les revenus des agriculteurs du sud lors d’une relation mutuellement avantageuse (bon prix pour l’agriculteur – bonne qualité pour le consommateur), cet énoncé peut être erroné lorsque le marché est défaillant. Or, le manque d’information est une défaillance du marché souvent rencontré dans les pays du Sud. Les agriculteurs dits du Sud sont rarement au courant de leur coût de production, des prix de leur production sur le marché, et nombre d’entre eux n’ont même pas conscience de la fluctuation des prix des denrées alimentaires au cours du temps. Face à ce manque d’information, il est évident qu’un agriculteur peut facilement se faire payer à un prix largement inférieur à celui qu’il aurait dû percevoir.

Augmenter l’accès à l’information chez les agriculteurs (ex. utilisation de la radio locale) permet de réduire cette défaillance du marché et d’ainsi fixer des standards de poids, de qualité et de prix de référence à utiliser ; les agriculteurs sont donc à même de négocier un prix de vente juste et équitable. L’instauration de formation, tant pour la compréhension du marché (fluctuation des prix) que pour l’évaluation des coûts de production d’une culture, permet également d’augmenter le pouvoir des agriculteurs à négocier les prix face à leurs acheteurs.

 

Faire face aux cartels

Les regroupements d’intermédiaires en cartels* sont également une défaillance du marché. Ces situations assimilables à des monopoles sont des situations où tout le monde y perd (l’ensemble des richesses produites est moins important qu’en situation où le monopole n’existe pas), mais où la majorité des richesses revient au cartel lui-même.

Ces situations néfastes sont contrôlées dans tous les pays. Cependant, dans les régions isolées des pays du Sud, ces contrôles sont rarement effectués et souvent sujet à de la corruption. Les cartels peuvent donc s’y créer assez facilement en toute impunité.

Pour faire face aux cartels, deux solutions existent ;

  1. Les cartels sont relativement faibles et les associés du cartel ne resteront dedans que si le cartel possède au min. 80% des parts du marché. Ce chiffre est souvent monté à 95%. Dès lors, tout autre intermédiaire arrivant dans la filière et détenant plus de 10% des parts du marché fera éclater le cartel.
  2. La création d’un contre-cartel peut également faire éclater le cartel initial (par exemple : une association de producteur contre le cartel des intermédiaires). Cela se produit lorsque les producteurs s’associent pour fixer un prix minimum de vente. Le problème avec cette méthode est qu’elle prend du temps à faire son effet et que le contre-cartel est souvent plus fragile que le cartel lui-même. Par conséquent, par usure, le contre-cartel peut éclater avant d’avoir fait éclater le cartel initial.

(*) Cartel = entente de producteurs ou de commerçants pour faire monter les prix en vendant moins.

 

Où est-ce intéressant d’avoir des ONG (ou coopérative) sur le terrain ?

Si les communautés villageoises et les systèmes locaux de commercialisation sont déjà là pour remplir des fonctions sociales vitales, pourquoi alors intervenir avec des ONG’s sur le terrain ?

Parallèlement à ce qui a été vu précédemment, les ONG’s sont essentielles dans les zones agricoles où l’information est faible. Utiliser la radio locale pour donner des renseignements sur les prix agricoles, ainsi qu’offrir la possibilité aux agriculteurs de se former tant sur la manière de cultiver leurs champs que sur le système économique actuel et la gestion de coopérative est indispensable pour diminuer les défaillances du marché et permettre aux agriculteurs du Sud de vivre « dignement ».

Deuxièmement, les ONG peuvent aider à l’instauration de coopérative au niveau local. Si ces coopératives prennent suffisamment de part du marché, que ce soit en vendant sous le label équitable ou non, elles peuvent éviter la formation de cartel (si présent). Dans le cas des contre-cartels, les ONG ont également un rôle à jouer en soutenant les agriculteurs dans leurs démarches. Cependant, cette mesure est à prendre avec des pincettes car elle peut être source de conflits et méfiance des agricuteurs entre eux.

Ensuite, l’agriculture étant un métier à risque (risques de fluctuation des prix, risques climatiques, …), elle n’incite pas les agriculteurs à modifier leurs pratiques ou à cultiver de nouvelles plantes. Le soutient des ONG’s permet aux agriculteurs de mettre en place des cultures qui sont par exemple plus rentables pour les populations locales et qui n’auraient pas vu le jour sans ce soutient.

Dernièrement, dans le cas de circuits courts par exemple, les ONG peuvent améliorer l’organisation de la filière. Par exemple, elles peuvent amener à une meilleure organisation de la vente ou du transport. Cela est bénéfique à la fois pour le producteur qui doit moins se soucier de l’acheminement de ses produits, et pour le consommateur qui achètera un produit de meilleur qualité car ayant subit moins de dommage dans le transport.

 

À améliorer/réfléchir

  • L’insertion du commerce international chez les paysans du Sud soulève souvent la question du dénis de culture d’origine. Cependant, il est mal aisé de juger ce fait ; d’une part, cette décision revient aux populations locales et bien souvent elles sont désireuses de s’insérer dans le marché mondial puisque cela leurs permet d'accèder à un revenus. D’autre part, comme le dit Jean Louis Aubert dans sa chanson Sur les Plages : « Sur toutes les plages du monde (…) y a des mômes qui font signes aux bateaux. (…) Et si pour toi, là-bas c’est l’paradis, dis-toi qu’dans leur p’tite tête l’paradis c’est ici. (…) Dans tous les ports du monde (…) y a des vieux qui débarquent. (…) Et si pour eux, la vie c’était pas l’paradis, dis-toi que dans leur vieille tête l’paradis maintenant c’est ici. ». Prendre conscience que les populations dites du Sud idéalisent la vie « au Nord » permet également de faire la part des choses entre ce qu’elles veulent réellement ou non.
  • La création d’une filière commerce équitable peut réellement contribuer à améliorer le niveau de vie des agriculteurs du Sud. Cependant, il ne faut pas amener un projet de développement là où la main d’œuvre est déjà limitée. Ces nouvelles activités risqueraient de substituer certaines activités déjà profitables ou vitales pour la communauté. Dans le cas où la main d'oeuvre est limitée à certaines périodes de l'année mais pas à d'autres (ex. productions saisonnières), instaurer une activité rapportant un revenu supplémentaire en période creuse peut néanmoins être une bonne solution (ex. développer l’artisanat).
  • Les agriculteurs peuvent se regrouper en coopérative. Ils vendent ensemble leurs produits pour faire le poids contre les différents intermédiaires de la filière. Cependant, vente en commun ne signifie pas production en commun. La différence est énorme. Dans le cas du café Chorti par exemple, nous avons affaire à une vente en commune menant in fine à l’amélioration du niveau de vie des agriculteurs. Au contraire, les productions communes telles qu’elles ont été menées en URSS avec les fermes d’Etat n’ont jamais réellement fonctionné car les incitants pour une production de qualité étaient moindre. En effet, la redistribution des revenus ne dépendait pas du travail fournis par chacun mais bien de la production totale dont les revenus dégagés étaient divisés en parts égales.

 

 Article rédigé suite à la rencontre avec le Pr Gaspart de l’UCL

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